Les Royaumes de Feu [RolePlay] Incarnez un personnage dans l'univers des Royaumes de Feu de Tui.T Sutherland, Parmis les sept tribus disponibles et partez à la découverte de Pyrrhia |
Météo du Mois de Juin : Nous auront des augmentations de températures sur l'ensemble de l'île, gare à la légère fonte des glaciers. De violents orages sont prévus sur la côte Sud, suivis de du beau temps estival. Le Royaume de mer connaîtra une température maritime de 28°C. Une pluie par semaine est à prévoir sur tout le territoire.
D'étranges évènements se sont produits au sein du projet mené par les Dragonnets du Destin, aucune information ne nous est encore parvenue.
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| De Plumes et d'Encre [Hermine/Mirage] | |
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Mirage Légende
Messages : 176 Or : 6077 Réputation : 4 Date d'inscription : 02/11/2016 Age : 23 Localisation : En Tyrie
Fiche Dragon Nom du Dragon: Mirage Métier: Clan: Aile de Sable
| Sujet: De Plumes et d'Encre [Hermine/Mirage] Mar 31 Oct - 14:11 | |
| Les journées avaient été terriblement longues depuis son départ du palais de glace – et pourtant, là-bas, les jours comme les nuits lui semblaient presque interminables. Mirage avait voyagé quasiment sans jamais s'arrêter. Il s'était forcé à se poser une fois à cause d'une tempête de neige et avait repris la route avant même que le vent n'aie totalement fini de souffler. Mais peu à peu, au fil des lieues qu'il parcourait, le froid se dissipait, le soleil jaunissait et la couverture de neige montrait un sol rocailleux là où elle avait fondu. Il fut donné à Mirage de voir des arbres ; ils étaient nus et biscornus, couleur de poussière, mais c'était bel et bien des arbres. Différents des pics cristallisés pâles comme la mort qui avaient miraculeusement réussi à pousser dans le désert de glace près des lacs gelés.
Finalement la pierre se mêla au sable, des gouffres et des arcades de roches roussâtres se dessinèrent en contraste avec la monotone platitude des plaines qu'il avait survolé. Un labyrinthe muet, où seuls résonnaient les échos de pierres qui bougent, de chutes de sable, et les sifflements du vent. Pas un crotale ne faisaient sonner ses anneaux ; Mirage était seul. Il se posa un instant et s'étira les ailes. Il n'était même pas sûr de pouvoir se relever tant ses muscles étaient engourdis par les longues journées de vol. Mais il savait qu'il approchait de la fin, et que chaque battement d'aile le rapprochait un peu plus de sa famille. Ce troisième jour était le dernier avant l'aboutissement de son voyage. Bien que cela lui coûta un effort terrible, le dragon s'éleva au dessus du dédale pour poursuivre sa route, cette dernière pensée lui insufflant l'énergie nécessaire pour y parvenir. Il plana un long moment au dessus des dunes, laissant le soleil agresser ses écailles. Après deux ou trois longues heures de vol, l'Aile de Sable vit se découper le Bastion d'Épine au fond de l'horizon. Cependant, là n'était pas sa destination. S'il cherchait la tranquillité, il valait mieux éviter un endroit dans lequel les affaires pressaient. Il ne lui restait que quelques lieues avant d'atteindre le Repaire du Scorpion où se trouvait sa famille.
Enfin il aperçut les structures anguleuses du repaire. A cette vue, son cœur se serra, ses battements d'ailes s'intensifièrent. Il rentrait enfin chez lui...
Mirage se posa maladroitement sur une dune, manquant presque de s'écraser dedans. Il plongea ses pattes dans le sable d'or, le laissant glisser entre ses doigts. Le dragon soupira de contentement. Qu'il était bon de le sentir à nouveau s'infiltrer entre ses écailles..! Il s'avança vers les structures que la chaleur dans l'air faisait vaciller. Contrairement à d'habitude, les porte étaient ouvertes. Mirage imagina que maintenant que la chef des Rebailes était au pouvoir, elle avait dû supprimer la taxe et laissait les réfugiés entrer librement dans le Repaire du Scorpion. Il s'approcha de l'entrée qui était tout de même contrôlé par des gardes.
"- Halte ! Nous devons connaître votre identité et vos intentions avant de vous laisser entrer. Par les sables, qu'est-ce que vous trimballez là..?! - Je suis Mirage. Je rentre du Royaume de Glace pour retrouver ma famille. Le garde ouvrit de grands yeux d'illuminé. - Mirage..? Par tous les sables..! Je ne vous avait pas reconnu ! Vous avez sacrément mauvaise mine... Entrez donc. Je connais votre fidélité pour la reine. Vous pouvez passer. - Merci.."
L'érudit avança sous le regard plein de pitié de son congénère. Visiblement, son état sautait aux yeux de tout le monde. L'animation dans cette ville n'avait pas changé, si ce n'est que le commerce semblait s'y être bien développé depuis la dernière fois qu'il était venu. Des odeurs d'épices, des babioles et des tissus colorés ornaient les étalages et les bâtiments. Mirage s'attarda sur quelques expositions pour s'en remplir les yeux alors qu'il progressait vers le cœur de l'oasis. Le lac d'eau turquoise était lui aussi très animé et toujours aussi joli avec ses nombreux palmiers verts et ses nombreuses autres plantes colorées. Plusieurs dizaines de dragons, essentiellement des Ailes de Sable, étaient venu se désaltérer. Mirage fit de même.
"- Euh..M..Mirage, c'est..? C'est toi ? Questionna la dragonne qui se tenait à côté de lui alors qu'il avait le bec plongé dans l'eau. Mirage leva brusquement la tête, reconnaissant la voix qui s'adressait à lui.
- Vautour ? - Misère... Mon pauvre petit, mais qu'est-ce qu'il t'es arrivé..? - Le Royaume de Glace, sans aucun doute... Heureux de te revoir, ma tante. La dragonne le prit entre ses ailes. - Moi aussi... Ne t'en fait pas, tata Vautour va bien s'occuper de toi. Je vais te raccompagner chez ta mère. Tu dois avoir des tas de choses à nous raconter ! Ne perdons pas de temps ! Viens à la maison !"
Mirage hocha vivement la tête – tout du moins, le plus vivement qu'il le pouvait.
Vautour le couvrit comme un dragonnet sous sa voilure et tous deux traversèrent la ville pour entrer dans un haut bâtiment en grès, encré dans les remparts de la ville. La dragonne laissa son neveu entrer le premier.
"- Oh... Ça en fait, du changement..!" murmura Mirage.
L'entrée étaient encombrée de plusieurs caisses d'aménagement qui contenaient essentiellement des tissus, du coton, des teintures et beaucoup d'autres matériaux. Elle donnait directement sur une pièce principale vide. Au fond de la pièce étaient sculptées dans la roche trois arches qui invitaient sur un balcon bien plus modeste, donnant une vue sur la magnificence du désert.
La mère de Mirage était justement ici, au milieu d'un espace creux qui allait devenir ce qui semblait être un bassin. Elle était accroupie, concentrée dans son imposant travail qui consistait à coller des carrés de mosaïque représentant une magnifique rosace de diverse nuances de bleu et de blanc. Le travail était au trois quart terminé et la dragonne n'en démordait pas, collant les petits fragments un par un avec grande patience.
"- Soleil ? Je suis rentrée ! L'intéressée de quitta pas son œuvre des yeux et prononça, lasse : - Ah oui..? Déjà..? Et qu'est-ce... qui te met de si bonne humeur..? - Oh, rien de particulier... J'ai simplement rencontré l'aîné de mes neveu à l'oasis, déclara Vautour comme si cela avait été normal. - L'aîné de mes enfants est Mirage. Tu as dû te tromper, il est au Royaume de glace, en train de se tuer à petit feu pour une tâche qu'il ne peut accomplir seul, répondit amèrement sa sœur en haussant les arcades d'écailles qui lui faisaient office sourcils. - C'était le cas, il y a de cela trois jours.."
Soleil cligna des yeux, leva la tête. Elle se redressa sur ses pattes arrière et posa ses outils. Elle avait peine à le croire : son fils était de retour à la maison. Mirage, l'aîné, son premier œuf. Son enfant le plus cher. Même si elle disait qu'elle aimait ses petits autant les uns que les autres, elle devait assumer que Mirage était et resterait toujours le favori. Ignorant totalement sa sœur, elle plongea son regard dans celui de son enfant bien-aimé.
"- Mirage... approche, mon fils."
L'érudit fit quelques pas et rejoignit sa mère en prenant garde à s'installer là où il n'y avait pas de mosaïque. Il inclina la tête et ferma les yeux, laissant sa mère l'examiner. Elle prit sa tête entre ses pattes, inspecta chacune de ses écailles, caressa l'angle de sa mâchoire, sa crête abîmée et ses écailles ternies, contourna son œil d'une phalange...
"- Eh bien, tu t'en es fait du mal, constata-t-elle. Allons, allons. Je sais ce qui te fera du bien !" Dit-elle en faisant un signe à Vautour qui lui répondit en hochant la tête.
Soleil était de ceux que rien ne semblent ni impressionner ni émouvoir. Elle le pouvait pourtant mais ne trahissait jamais la figure d'assurance qu'elle montrait à tout les dragons qui l'entouraient, même de sa famille. C'était pour garder le contrôle. Dans d'autres cas, de telles retrouvailles se seraient fêtés en grandes embrassades, mais la famille de Mirage avait coutume de tout faire dans la plus grande classe. Et d'entre tous, Soleil était LA plus classe. Elle était la maîtresse, la savante, la bienveillante, la protectrice. La reine de son empire (ce qui faisait plutôt d'elle une impératrice) et une première référence de sagesse d'Épine. Cette dernière avait voulu lui confier la charge de la ville après son couronnement, mais Soleil n'aspirait qu'à la tranquillité du quotidien et jugeait que ses actions héroïques passées avaient suffisamment rempli sa vie pour qu'elle puisse prendre congé de toute responsabilité hormis celle de ses enfants. C'était pour eux qu'elle vivait.
Les deux dragonnes guidèrent Mirage sur le balcon. Celui-ci était plus long que large, mais suffisamment spacieux pour que trois ou quatre dragons puissent s'y tenir en étant libre de leurs mouvements. À gauche se trouvait un escalier qui permettait d'accéder au balcon d'à côté qui se trouvait en hauteur. Ce balcon là était celui de la chambre de Mirage. Soleil pénétra dans la pièce la première. Mirage écarta lentement le rideau de perles de la pointe des griffes et contempla l'intérieur. C'était magnifique, encore une fois. La pièce était moyenne, mais joliment meublée et décorée. Tout dans un thème de vert et de noir. Il y avait de nombreuses tapisseries, des ornements de toutes sortes, des cactus et autres plantes du désert. Une grandes couche était installée dans un creux du mur qui faisait extension, comme si cet espace uniquement consacré au sommeil était une petite pièce à elle toute seule, surélevée de deux marches et séparé du reste par des rideaux de perles et de soie. Mais ce qui rendait ce petit endroit incroyable, c'était le toit : une armature complexe en bois sec reliait des toiles bleues vif clairsemé ; trois fenêtres à même le plafond donnait une vue sur le ciel, étoilé la nuit. En visitant sa propre chambre, Mirage reconnaissait là l’œuvre de sa mère. C'était une artiste, une originale.
"- C'est... méconnaissable.. ! Murmura Mirage, émerveillé. - J'espère au moins que ça te plaît. J'y ai mis toute mon âme en attendant que tu reviennes un jour. Je sais que tu es sensible aux changements d'environnement. Je veux qu'ici, tu te sentes le mieux possible. - Merci... Vraiment, il ne fallait pas te donner cette peine.. - Je n'ai rien d'autre à faire de mes journées tu sais. Je suis « à la retraite. » - Là, tu mens. Moi aussi, je te connais maman, Déclara Mirage. Il était bien le seul à oser contredire Soleil aussi facilement. Cette dernière étouffa un rire d'une demi-seconde avant de reprendre : - Viens par là. Vautour et moi allons nous occuper de tes triiiiistes écailles. Elles sont toutes grises. Je les ai connu bien plus flamboyantes. - Ah Mirage, tu as de la chance, elle t'as fait un compliment. Moi, je ne reçois jamais rien, commenta Vautour. - Parce que tu réagis toujours comme tu viens de le faire. Tu en aurais si tu n'en réclamais pas toujours."
Soleil et sa sœur s'appliquèrent à soigner Mirage une bonne partie de l'après-midi. Il eut droit à des soins de luxe ; remèdes, massages, polissage des écailles et bains de sable. Les deux sœurs se montraient très professionnelle dans leurs entreprises. Vautour était guérisseuse, elle savait très bien ce qu'elle faisait. L'Aile de Sable se laissait faire et lui obéissait à la griffe et à l’œil, puis dormit jusqu'au crépuscule où il fut réveillé par les voix de ses deux petites sœurs.
"- C'est vrai ? Mirage est rentré ? - Ça fait combien de temps qu'on ne l'a pas vu..? - Moins fort. Il dort. - Euh... est-ce qu'il sait pour.. ? - Non. Coupa Soleil. - Il vaut mieux le lui dire avant qu'il ne s'en rende compte lui-même. Il ne faudrait pas le lui cacher, ce serait comme de le trahir. Remarqua Vautour. - Je crains de ne pas trouver le bon moment. Il n'est déjà pas en bonne santé et je ne voudrais pour rien au monde le blesser davantage. - Physiquement, il n'est pas en forme, mais il a toute sa tête. Tu sais mieux que moi qu'il le supportera. Il fort, ton fils. Il est vraiment très fort. Il en a assez vu pour accepter une mort de plus. - Oui. Ou alors, il en a assez vu et n'a pas besoin qu'on ne lui en rajoute plus. Répliqua la mère. - Tu ne vas quand même pas le lui cacher ? Soleil secoua la tête. - Je ne peux pas de toute façon... Il est aussi malin que moi. Mais encore plus sensible... - Tu veux que je le lui dise ? Proposa sa sœur. - Non, c'est mon fils et c'était son demi-frère. C'est à moi de le faire. - Alors, quand comptes-tu le faire ? -Dès qu'il sera levé..."
Mirage n'avait saisi que des bribes de la conversation. Il avait parfaitement entendu ses sœurs au début parce qu'elles parlaient un peu fort, mais avait compris l'essentiel : Aigle était mort et sa mère avait peur d'aggraver son cas de santé en lui apprenant la nouvelle. Cette pensée l'énerva un peu. Il n'était pas malade, il allait bien, il se sentait bien et ne ressentait aucun besoin d'aide. Se reposer lui faisait perdre du temps. Il se leva, sortit sur le balcon. Le soleil avait tout juste été englouti par l'horizon. Ne restait de lui qu'une large ligne rouge-rosée au dessus de dunes lointaines. Au dessus de lui, la voûte bleu sombre du ciel était parsemé de milliards d'étoiles scintillantes. L'ambiance était si calme... Il descendit les quelques marches qui menait au balcon de la pièce principale. Il remarqua une petite porte en face des escaliers, qui menait à une pièce juste en dessous de sa chambre et de son balcon. Il se demanda ce qu'il pouvait bien y avoir derrière, mais ce n'était pas le moment de faire une visite de sa demeure familiale. Il pénétra dans la pièce principale dans laquelle ses petites sœurs, sa mère et Vautour terminaient la mosaïque au centre du grand salon. Toutes les quatre levèrent la tête, une pointe de panique dans le regard qu'elle essayèrent toutes de cacher mais qui n'échappa pas à Mirage. Après quelques secondes de silence, Soleil prit la parole.
"- Si tu viens pile à ce moment là, ce n'es pas par hasard, n'est-ce pas ? - …Non, en effet. Je n'ai pas fait exprès, j'ai juste entendu... - Ne t'en fais pas. Je vais te raconter ce qui s'est passé", le coupa sa mère en levant une griffe, l'intimant de s'asseoir comme aux autres.
Aigle était le demi-frère de Mirage. C'était un jeune dragon de l'âge des dragonnets de la prophétie aussi impétueux et téméraire qu'un Aile du Ciel, mais aussi altruiste que Mirage lui-même et qui aspirait à ressembler à son grand frère un jour. Il croyait en la paix entre les royaumes et aidait les étrangers au désert du mieux qu'il le pouvait pour leur montrer que leur royaume n'était pas si inhospitalier et que tout le monde y était le bienvenu. Il avait rencontré une dragonne sur un des plateaux rocheux du désert qui explorait les environs. Elle était persuadée d'avoir trouvée une ancienne structure et interrogeait Aigle à ce propos, curieuse de savoir si cet endroit qu'elle cherchait était connu des Ailes de Sable. Aigle n'en savait rien, et le sol avait soudainement craqué sous leurs pattes. Avant qu'il n'ai eu le temps de se rattraper en vol, tous deux sont tombés dans le mesa. Cependant, ils n'ont pas eu la même chance et Aigle s'est embourbé dans un torrent de sables mouvants remplis de vipères dragons. Ils étaient visiblement tombés dans un nid, et la dragonne n'avait rien pu faire pour le sauver. Aigle lui a remis un bijou et a donné le nom de Soleil pour qu'elle la lui remette. C'est de cette dragonne que la famille a pu avoir le récit tragique de la mort d'Aigle.
"- Qui était cette dragonne ? Questionna Mirage. - Elle n'a pas voulu nous dire son nom. Elle ne voulait pas qu'il « soit rattaché à ce terrible souvenir. » C'était une Aile de Mer, bleu foncé mais avait des aigrettes d'Aile de Pluie.
Le dragon baissa les yeux, incrédule. Se pouvait-elle être Chavire ? Cela lui semblait impossible, mais lui redonnait une flammèche d'espoir par dessus la peine qu'il éprouvait d'avoir perdu un frère. Heureusement, contrairement à ce que Soleil pouvait penser, Mirage supportait bien la mort. Il avait appris à l'accepter. Ses seuls regrets étaient de ne pas avoir pu profiter de son frère, ce frère qui semblait, d'après le récit de sa mère, le connaître mieux que lui ne le connaissait déjà. Il avait presque honte de ne pas pleurer la mort d'Aigle, car celui-ci semblait beaucoup l'aimer tandis que Mirage ne le connaissait que très peu et, bien qu'il soit attaché à lui, la distance, le temps et les événements avaient enseveli cette amitié fraternelle. Aigle ne l'avait jamais oublié, Mirage si. Pour le dragonnet, l'érudit était une figure d'autorité qu'il citait de temps à autre, comme quoi il avait profondément marqué sa jeunesse. C'était précisément cela qui nouait la gorge du dragon. Il ne se souvenait même plus de la dernière fois qu'ils avaient échangé leurs derniers mots. Mirage avait honte de cela. Si peu de souvenirs... Et pourtant, ils auraient pu en créer tellement plus. Si Chavire était la dernière dragonne à l'avoir vu en vie, cela lui faisait une raison de plus de la retrouver. Il aurait tant voulu lui parler à nouveau... Par les sables, une Aile de Mer avec des aigrettes à la recherche d'une cité perdue... Ce ne pouvait être qu'elle ! De plus, elle avait dû comprendre qu'il s'agissait de la mère de Mirage lorsqu'elle a dû apporter la nouvelle, ce devait donc être pour ça qu'elle avait refusé de dire son nom. Pour que Mirage ne pense pas que tout était de sa faute, sûrement parce qu'elle culpabilisait... Pauvre Chavire. Si seulement il pouvait lui dire que tout allait bien. Mirage ne dit rien de ses pensées et hocha simplement la tête.
"- Il est aux cieux maintenant. Il veille sur nous. Depuis la guerre, il y a de plus en plus d'étoiles dans le ciel... Cherchons celle qui n'y était pas avant ce jour funeste et adressons-lui une prière. - Nous lui avons gravé une pierre et l'avons mise dans l'impluvium, avec celles de nos ancêtres... - Je vais aller lui rendre hommage... - Non, non. Repose-toi encore un peu. Ça peut attendre demain, assura Soleil.
Les deux sœurs de Mirage se blottirent contre lui, comme pour lui apporter du soutien. Elles étaient très contentes de le revoir, aussi. Et qu'est-ce qu'elles avaient grandi. Mirage avait l'impression d'être parti depuis une éternité, qu'un siècle entier était passé par-dessus son enfance. Pourtant, il était encore dans la jeunesse de l'âge, mais le simple fait de revoir la maison de sa mère, ses sœurs... de voir tout ce qui avait changé durant son absence, il se sentait vieilli d'un coup. Il passa une aile au-dessus de chacune de ses soeurs en réponse à leur étreinte. Après un instant, ils se délièrent. Ibis regarda son frère avec une grimace désolée et pleine de tendresse à la fois.
"- Tu étais bien moins terne dans mes souvenirs. Et bien moins maigre, aussi. - Ou bien plus gras, renchérit Isis avec un sourire. - Notre frère n'a jamais été gras. Il a toujours été prédisposé à la maigreur. - Alors il était plus musclé ? Les muscles donnent du volume au corps. - C'est possible. - Disons qu'en temps de guerre, on a l'occasion de faire beaucoup d'exercice. Au royaume de glace, on manque d'appétit. - Tu manques d'appétit. Personnellement, plus il fait froid, plus je ressens le besoin de me nourrir. - Les Ailes de Sable ne sont pas naturellement de gros mangeurs. C'est à cause de l'adaptation au désert qui nous apprend la privation alimentaire, fit remarquer Mirage. - Les Ailes de Boue le sont, par contre, affirma Ibis. - Ça, c'est une idée reçue. Même si elle n'est pas totalement infondée, répliqua-il avec science. - Et c'est parti... grinça Vautour en ravalant de justesse un rire qui lui resta néanmoins accroché aux commissures des lèvres. - On va s'en tenir là, les interrompit leur mère avec autorité en déployant ses ailes majestueusement, en prévention d'un long débat. Allons, Mirage, mon chéri. Vas dormir. Isis, Ibis, allez-y vous aussi. Votre frère vous racontera toutes ses aventures demain. - Mes aventures... Je me souviens de la monotonie du quotidien. À vrai dire, c'est comme si je sortais d'un rêve. J'ai l'impression que tout ce que j'ai vécu, je l'ai vécu dans une autre dimension... c'est drôle... - ...Ah oui, en effet. C'est flagrant. Il a besoin de dormir, mon pauvre frère. Piqua Ibis en le regardant comme s'il délirait, mais elle trahit cette fausse expression par un sourire mesquin. Isis le flanqua un petit coup d'aile dans l'épaule. - Allez frérot. Maman s'est drôlement appliquée pour faire ta chambre. Elle a tout fait elle-même, et n'a même pas voulu qu'on l'aide tellement elle est perfectionniste. Profites-en bien, tu dors dans le plus grand chef-d’œuvre de la maison, petit veinard. - Au lit.
Cette fois-ci, Ils se firent pas prier davantage. Quand Soleil donnait un ordre, il valait mieux s'exécuter immédiatement, être rapide et efficace. Ils se saluèrent et saluèrent leur mère, se souhaitant à chacun une bonne nuit. Mirage gravit lentement les escaliers du premier balcon pour atteindre son espace personnel. Il y régnait une pénombre bleutée calme. Le dragon s'appliqua à allumer les hautes bougies dans les lampes filigranes en métal mordoré, travaillée avec une extrême minutie. La lumière projetée sur les murs était alors sculptée et donnait à la pièce une ambiance des plus relaxantes. Mais malgré tout, Mirage avait manqué un cycle de sommeil et se trouvait réveillé, debout à se tourner les griffes. Il déambula dans ses appartements, cherchant une occupation en attendant que le sommeil le gagne à nouveau. À moins de l’assommer, impossible à son cerveau de cesser de ruminer et il ne put l'empêcher de jeter un œil vers ses derniers souvenirs les plus récents. Souvenirs qui se tournaient vers le royaume de glace, et dont le froid le faisait frissonner rien que d'y penser. Une réminiscence lui revint et il écarquilla de grands yeux, comme s'il avait été frappé par la foudre : il avait promis à Hermine de lui envoyer une lettre dès son retour au désert. Cela semblait tenir beaucoup à cœur à la dragonne, elle qui avait si peu de choses dans la vie pour se réconforter. Si Mirage pouvait lui apporter un brin de bonheur, il le ferait, comme tout ami respectable. Elle se contentait de si peu de choses et qui pourtant méritait tellement plus. C'était aussi pour cela que Mirage luttait : la justice et l'équité. Plus de fossé dans la hiérarchie. Bien entendu, un monde de rêve que Mirage ne parviendrait jamais à réaliser. Hors de raison mais jamais hors d'horizon à ses yeux. Au moins peut-être laisserait-il derrière lui un monde meilleur, même si pas aussi parfait qu'il le souhaitait, car sa quête de la paix totale ne dépasserait jamais le seuil de son esprit pour devenir réalité.
Il s'attabla à son bureau, tira d'une étagère un long rouleau de papyrus et en coupa une feuille avec une infinie précision. C'était différent du parchemin dont la texture était différente et bien plus solide. S'il en avait eu, il en aurait utilisé mais le désert de sable n'était pas l'endroit idéal pour en produire, alors on se servait de cet entrelacs de tiges sèches comme support d'écriture, bien qui ne soit pas particulièrement résistant comparé au parchemin que Mirage avait pris l'habitude d'utiliser (et ce dans quoi la majeur partie de sa fortune se perdait.). Il craignait de ne pas écrire jusqu'au bout ou d'écrire plus que ce que le papier ne lui permettait, mais il n'allait pas chipoter ni faire du gaspillage. Des affaires qu'il avait ramenées, (et toujours pas défaites d'ailleurs), il sortit sa plume, son encre et son buvard.
Voilà plusieurs minutes qu'il restait inerte devant cette page vide. Il fixait le blanc sans cligner. Qu'attendait-il ? Les lignes n'allaient pas se remplir toutes seules. En réalité, il ne savait pas par où commencer. Le voyage, sa famille, son frère aussi... Il ne s'était même pas écoulé un jour entier depuis qu'il était de retour chez lui qu'il y en avait déjà trop à raconter. Alors, il se jeta à l'eau en se faisant cette réflexion : Commençons par le commencement.
Salutations, Hermine.
Ante Scriptum : Je tiens à préciser que je n'ai jamais été doué pour formuler mes lettres. J'ai toujours un mal fou à m'organiser, mais je vais faire de mon mieux et essayer d'être le plus synthétique possible (autrement, vous liriez un roman.).
En premier lieu, je tiens à vous rassurer du fait que le voyage s'est passé sans encombre. Je vous avouerais que j'ai peu dormi, mais c'était l'appel de ma terre natale qui m'a tenu éveillé durant ces trois longs jours de vol. J'ai traversé de mornes plaines avant d'atteindre les dunes. Ça fait drôle de passer de la neige au sable en si peu de temps..! Les choses semblent prendre couleur autour de moi, et je me rends compte que vous aviez plus que raison sur la nécessité pour moi de retourner au désert. Ma place biologique est là-bas, c'est incontestable. Je ne suis pas fait pour vivre au Palais de Glaciale. Enfin, mon corps ne l'est pas. Si je pouvais m'affranchir de cette enveloppe charnelle, ce serait l'idéal... Je m'imagine parfois n'être qu'une simple esprit flottant dans l'air, libre de tout besoin physique et libre de pouvoir me consacrer pleinement à mon travail sans jamais souffrir. Je dois vous paraître un peu bizarre, soudain, j'imagine. Bref, je m'emporte déjà. Je suis arrivé au zénith du soleil, au repaire du Scorpion. Il s'agit d'une ville construite autour d'une oasis qui accueillait les nécessiteux et surtout toute sorte de malfrats. Elle était sous la coupe de la nouvelle reine de sable Épine, chef des Rebailes dont j'ai fait parti durant longtemps – mais là encore, c'est une autre histoire – et dont la principale caractéristique est son activité commerçante. On y vend de tout, des biens comme des services, et les marchés sont toujours bondés. C'est un lieu très animé, parfumé et coloré. Après tout ce temps, elle avait changé. J'ai compté de nouveaux bâtiments et des rénovations. J'ai croisé ma tante, Vautour, au cœur de l'oasis. C'est elle qui m'a repéré. Elle a l'oeil vif. Elle m'a accueilli comme un nouveau-né et m'a conduit au rempart nord-ouest de la ville dans lequel nous logeons tous. L'endroit est devenu tout simplement méconnaissable. Étant une grande artiste, ma mère a réaménagé nos vieux appartements et en a fait un véritable palace. Je n'ai pas osé lui demander tout ce que cela lui avait coûté... probablement une fortune. Elle avait resculpté les colonnes, les arches, et tout est orné de magnifiques tissus et mosaïques. Je pourrais vous décrire son travail longtemps mais je ne suis pas sûr que ce point vous intéresse tout particulièrement, et si c'est le cas, faites-le moi savoir et je vous joindrais des croquis avec la prochaine lettre. Et comme je m'égare (encore une fois), j'en reviens à mon récit initial. Ma mère, Soleil, et Vautour m'ont tout de suite pris en charge. J'ai été chouchouté plus que nécessaire à mon avis, mais je me plie aux impératifs de Vautour. Après tout, elle est guérisseuse de métier, elle sait ce qui est bon pour moi. C'est elle qui m'a appris à suturer. Encore une longue histoire... Mais je passe. Il s'est passé quelque chose de tragique pendant mon absence. Plus j'y pense, plus j'ai de regrets. Mon jeune demi-frère a été victime d'un terrible accident. Le sol s'est dérobé sous ses pattes et il a chuté dans des sables mouvants. C'est l'un des plus grands dangers de nos terres, et même nous, ailes de sables, y trouvons la fatalité de la mort... J'ai grand peine quand je pense à lui. Aigle, c'était son nom, me considérait comme un héros et je ne le savais même pas. Il paraît que j'étais pour lui une figure d'autorité incontestable... Je regrette de ne pas l'avoir mieux connu. Il était le cadet de la famille. Mourir si jeune... Il n'avait que sept ans. Cependant, quelque chose m'a interpellé dans le récit de ma mère. Effectivement, nous n'aurions jamais su ce qui lui était arrivé si la dragonne avec qui il conversait à ce moment là ne nous avait pas rapporté cette nouvelle. D'après la description que ma mère a faite, j'ai toutes mes raisons de penser qu'il s'agissait de Chavire. Je l'espère... Mais je ne dois pas me surmener. Il faut que je me concentre sur ce pourquoi je suis ici ; le repos. Mais comment être en paix avec tant de choses en tête..? Parfois, j'ai l'impression de tellement réfléchir que je vais m'évanouir.
Au moment où j'écris cette lettre, je ressort d'une fausse querelle avec mes sœurs, Isis et Ibis. Elles sont déjà presque adultes... mais toujours aussi espiègles ! Ah, le temps passe si vite... La nuit est tombée depuis plusieurs heures déjà. Les étoiles sont aussi visibles dans le ciel qu'au royaume de glace et la lumière des lunes filtre à travers les tentures bleues arrangées par ma mère. C'est si calme ici. On entend des grillons. J'avais presque oublié leur tintement semblable à celui de tout petits grelots. C'est comme un ancien souvenir qui surgissait du fond de la nuit claire... Le plus ancien de mes souvenirs.
En attendant de vos nouvelles, j'espère que vous vous portez bien, vous aussi, mon amie. J'aimerais pouvoir vous faire découvrir toutes ces choses communes à mon désert natal... C'est promis, un jour, je vous emmènerai explorer loin du royaume de glace. Vous verrez comme le monde est beau..!
Brillez dans la lumière, les autres brilleront dans la vôtre. Respectueusement Mirage, érudit et partisan de la paix.
Post Scriptum : j'ai joint l'adresse à laquelle vous pourrez me contacter.
Le dragon posa sa plume et se frotta les yeux. Il avait dû s'y reprendre à deux fois avant d'ajuster la longueur de sa lettre à celle du papier dont il disposait, ce qui faisait qu'il écrivait de plus en plus petit pour que le tout loge. Les lettres se tassaient un peu en bas de page à cause du manque de place.Tant pis, il n'allait pas perdre son temps à tout réécrire. Il roula soigneusement le papyrus et le glissa dans un écrin en bois gravé et verni. Demain, il la ferai envoyer par un coursier. Il essuya sa plume, ferma son encrier et éteignit les lampes. Il était tard, et la fatigue le gagnait. Mirage s'allongea sur sa couche et regarda le ciel à travers la tenture fenêtrée bleue qui semblaient réfléchir les étoiles, puis s'endormit, bercé par le carillon des grillons dans la nuit noire. | |
| | | Hermine
Messages : 270 Or : 5794 Réputation : 9 Date d'inscription : 09/05/2017
Fiche Dragon Nom du Dragon: Hermine Métier: Clan: Aile de Glace
| Sujet: Re: De Plumes et d'Encre [Hermine/Mirage] Jeu 2 Nov - 1:45 | |
| Du coin de l’œil, Hermine observait sa mère qui s’affairait autour du bureau de Mirage. Mélangeant avec un soin tout particulier différentes plantes réduites en poudre avec de l'eau glacée, l'autre Dragonne aux écailles rosâtres suivait à la lettre une recette qu'elle avait trouvé dans l'un des livres de sa bibliothèque. Aurore n'était peut-être pas Guérisseuse, mais elle était lettrée. C'était un fait assez rare dans les plus bas cercles, et l'Aile de Glace profitait de son avantage autant que faire se peux. Le fait de savoir lire lui permettait d'accumuler des savoirs, et de les réutiliser plus tard à bon escient. Sans cela, à l'heure actuelle, Hermine serait sûrement dans un pire état qu'actuellement, ses parents n'ayant pas les ressources nécessaires pour demander de l'aide à un Guérisseur. « Tu es sûre que cela suffira ? s'enquit Hermine, en retirant les anciens bandages qui protégeaient ses plaies.- Ce livre est utilisé par les Dragons souhaitant se tourner vers la voie des Guérisseurs. Tout devrait bien se passer. affirma Aurore. - Bien... Je te fais confiance. »Aurore se saisit du bol dans lequel se trouvait la mixture qu'elle venait de préparer. Elle se rapprocha de sa fille, déposa le récipient sur le sol avant de saisir avec délicatesse l'une des pattes d'Hermine. La plus vieille Dragonne retint un soupir en voyant l'état des chairs de sa petite souris de bibliothèque. Tout cela à cause d'une petite erreur... Un accident, rien de plus... L'Aile de Glace se permit de frôler délicatement les fils qui maintenaient les plaies fermées. Cela eut le don de faire frémir Hermine, qui craignait toujours qu'au moindre contact, ses blessures ne se rouvrent et ne la fassent à nouveau souffrir. Aurore cessa de s'intéresser aux plaies, et plongea un morceau de tissu dans la mixture qu'elle avait préparé peu de temps auparavant. Une fois le morceau d'étoffe bien imbibé du liquide grisâtre, la bibliothécaire l'appliqua sur la patte de sa fille. Hermine réprima difficilement une grimace en sentant le liquide froid sur ses chairs encore fragiles. Cette sensation se renforça quand Aurore enveloppa sa patte dans un nouveau bandage, le serrant fortement pour éviter qu'il ne glisse ou que le morceau d'étoffe ne tombe d'une manière ou d'une autre. La bibliothécaire répéta l'opération sur l'autre patte de sa fille. Une fois cela fait, l'Aile de Glace rangea son matériel dans une sacoche. Ne gardant qu'un morceau de tissu avec elle, Aurore laissa son sac sur le bureau, puis revint s'installer auprès de sa fille. Celle-ci avait déposé ses pattes sur un coussin, qu'elle avait prit le soin de recouvrir d'un vieux morceau de tissu pour éviter de le tâcher avec la mixture qui imprégnait en partie ses bandages. Bien qu'Hermine s'inquiétait de l'efficacité de la mixture fabriquée par sa mère, cela faisait deux jours qu'elle l'utilisait. Et la petite Aile de Glace savait qu'il fallait en général un petit moment avant que le tissu ne soit assez sec pour qu'elle puisse marcher sans déposer une partie de la mixture grisâtre sur le sol à chacun de ses pas. « Que comptes-tu faire aujourd'hui ? s'enquit Aurore, en terminant de nettoyer ses pattes à l'aide du morceau de tissu qu'elle avait gardé avec elle. - Mirage m'a laissé l'accès à ses livres. Je vais sûrement commencer par lire un peu, et après... Je verrais. avoua Hermine.- Tu as amené de quoi manger ? - Oui, ce n'est pas grand chose mais rassure-toi, c'est amplement suffisant pour moi.- Je l'espère... N'oublie pas que tu as besoin d'énergie pour te rétablir. lui rappela sa mère. - Je sais. Je prendrai soin de moi, promis. »Aurore observa sa fille, cherchant dans son regard une quelconque trace de mensonge. Hermine ne tarda pas à s'en rendre compte et esquissa un grand sourire, montrant ainsi à sa mère que tout allait bien et qu'elle pouvait partir le cœur tranquille. La bibliothécaire finit par se lever. Elle récupéra sa sacoche, puis dit, sur un ton dans lequel on sentait beaucoup d'inquiétude : « Je vais devoir y aller. Surtout, si tu as le moindre problème... - Je sais Maman, je sais. Je peux venir te voir ou envoyer quelqu'un te chercher. répéta Hermine.- Bon... Je... J'y vais alors... Je repasserai plus tard dans la journée, quand cela me sera permit. » Hermine adressa un petit signe de la patte à sa mère. Aurore lui rendit son signe, puis quitta la pièce, refermant la porte derrière elle. La petite Aile de Glace attendit que la mixture imprégnant ses bandages soit entièrement sèche. Ensuite, la servante se leva. Elle s'étira quelques instants, réveillant ses muscles engourdis, puis se dirigea vers le bureau de Mirage. Harmonie s'était installée là, coupant et redécoupant des morceaux de tissus qu'Aurore lui avait donné la veille. Il s'agissait de chutes provenant des anciens rideaux de la bibliothèque, qui avaient été remplacés il y a peu de temps. Le tissu était encore dans un assez bon état, raison pour laquelle Aurore avait prit l’initiative de le garder pour le donner à Harmonie. La petite Aile de Glace regarda sa charognarde travailler pendant quelques instants. La petite créature traçait des motifs sur les différents morceaux de tissu à l'aide d'un des morceaux de pierre noirâtre qui se trouvait en tant normal dans son récipient de fer. Quand Harmonie se rendit compte qu'elle était observée, elle se redressa, tapotant sur ses petites pattes pour en ôter la poussière noire qui les recouvrait. Suite à cela, la petite créature se mit à gazouiller, tout en montrant ce qu'elle venait de faire. Hermine se rapprocha d'avantage, se penchant sur l'ouvrage de sa charognarde. La servante se figea. Sur le tissu, Harmonie avait dessiné un Dragon. De manière simplifiée, bien sûr, mais Hermine savait que sa petite charognarde commençait toujours par dessiner grossièrement sur ses tissus avant de détailler le tout pour le résultat final. Au vu de la forme de base, la petite Dragonne déduisit qu'il s'agissait d'un Aile de Glace. De plus, la teinte légèrement bleutée du tissu s'approchait énormément de celle des Dragons vivants dans les plaines glacées. Harmonie se remit à gazouiller, montrant à nouveau le tissu puis son morceau de bois brûlé. Hermine caressa gentiment le haut du crâne de sa petite créature puis se dirigea vers les différentes étagères, laissant Harmonie travailler. Arrivée devant les nombreux ouvrages, la servante s'arrêta. Passant délicatement l'une de ses griffes sur la reliure de chacun des livres, pour mieux en déchiffrer le titre, Hermine finit par faire son choix. C'est donc avec plusieurs volumes entre les pattes que la petite servante retourna au niveau de la couche qu'elle avait improvisé dans un coin de la pièce. L'Aile de Glace avait préféré ramener certaines de ses affaires, pour ne pas s'approprier de trop l'espace de Mirage et qu'il retrouve ses appartements dans l'état où il les avait laissé. Hermine s'installa dans sa couche. Celle-ci était composée d'une couverture grisâtre, que la servante avait acheté avec une partie son précédent salaire. Si la couleur n'était pas des plus belles, le tissu était assez épais et somme toute assez confortable. La seule chose qu'avait emprunté Hermine à Mirage, c'était l'un de ses coussins, afin de pouvoir y poser ses pattes avant pendant ses lectures. La petite Aile de Glace ouvrit les différents livres devant elle, de manière à pouvoir tous les consulter en coup d’œil si c'était nécessaire. Aux livres de Mirage, la servante ajouta quelques ouvrages qu'elle avait trouvé dans la bibliothèque. Avec tout ce savoir, l'Aile de Glace espérait trouver des réponses à ses questions. La servante y réfléchissait depuis plusieurs jours. Elle voulait savoir d'où venait sa crise de la dernière fois, ainsi que les maux de tête qu'elle avait eu par la suite. Il devait bien y avoir une explication logique et rationnelle à tout cela. Hermine savait bien qu'elle n'était pas dans la meilleure des formes. Certes, elle faisait vraiment pâle figure par rapport aux nobles ou aux Dragons d'un cercle supérieur au sien mais la petite Aile de Glace avait toujours eu une santé normale. Elle ne tombait pas souvent malade, et si elle avait été grandement affaiblie après avoir été blessée, Hermine avait l'impression qu'il y avait autre chose. Et la servante comptait bien trouver ce qu'était cette autre chose. Hermine se plongea dans les différents ouvrages pendant plusieurs heures. Le constat à la fin de sa mâtinée de recherches fut sans appel. Rien. Rien ne correspondait à ce qu'elle avait ressentit la dernière fois. Pour ce qui était de ses maux de têtes, les différents ouvrages avançaient causes diverses, comme des migraines chroniques ou d'autres choses du même acabit. En bref, rien de concluant non plus à ce niveau-là. En effet, les livres disaient toujours la même chose : les symptômes auraient de se montrer bien avant et ne pas arriver d'un coup. La petite servante poussa un soupir et referma certains des livres avant de les ranger. Ensuite, la Dragonne se leva. Elle fouilla dans le sac qu'elle avait ramené avec elle, et en sortit quelques lanières de viande. Toutes étaient recouvertes d'une fine pellicule de givre, crée par les soins d'Hermine qui voulait pouvoir conserver sa nourriture dans les meilleures conditions. Tout en mastiquant avec application l'une des lanières de viande, Hermine continuait de réfléchir au sujet des troubles dont elle était victime. Rien ne lui venait à l'esprit. Pourtant, il devait bien y avoir une raison à tout cela, ainsi qu'un remède. Hermine doutait que les quelques tisanes que sa mère lui donnait pour apaiser ses maux de crâne soient suffisantes sur le long terme, et vivre dans la hantise d'une nouvelle crise ne plaisait guère à la petite Dragonne... Son repas terminé, Hermine voulut reprendre ses recherches. Alors qu'elle consultait un livre qu'elle avait laissé de côté sans s'en rendre compte pendant ses précédentes lectures, quelqu'un frappa à la porte. La petite servante déposa son livre, et alla ouvrir. L'Aile de Glace qui se trouvait de l'autre côté de l'huis la détailla d'un regard. Hermine baissa poliment les yeux, se demandant ce que faisait ce Dragon ici. L'inconnu finit par hausser les épaules avant de détourner son regard d'elle. Il fouilla dans la sacoche qu'il portait et en sortir un écrin de bois verni. Ensuite, le Dragon demanda : « Suis-je bien aux appartements de Mirage ? Êtes-vous Hermine ? - Je... C'est bien moi, oui.- Tenez, c'est pour vous. Du Royaume de Sable. » Le messager tendit l'écrin à la Dragonne avant de la saluer et de repartir d'où il venait. Hermine ne put s'empêcher de penser que ce n'était pas là un comportement normal vis-à-vis d'elle ou de son cercle. Ce Dragon devait être vraiment absorbé par sa tâche pour agir de la sorte. La petite Aile de Glace chassa cette idée de ses pensées. Elle venait de recevoir des nouvelles du Royaume de Sable ! Mirage n'avait pas oublié de lui écrire ! Hermine referma la porte de la pièce à la hâte et fila en direction du bureau. En la voyant arriver, Harmonie cessa son ouvrage et émit plusieurs petits cris interrogatifs. La petite Aile de Glace ouvrit l'écrin et en sortit son contenu. Ensuite, la servante déposa le petit coffret non loin de sa charognarde, et entreprit de dérouler... Tiens, c'était bien la première fois qu'Hermine voyait un support de la sorte. Une chose était sûre, ce n'était pas du parchemin. La petite Aile de Glace prit l'une des extrémités du support, et la passa entre ses griffes. On aurait dit une sorte d'écorce, très fine. C'était assez étrange, mais assez agréable au toucher. Finalement, la servante se désintéressa du support. Après tout, ce qui était important n'était pas la matière utilisée pour fabriquer cet étrange parchemin, mais le contenu de la lettre ! Mirage n'était partit que depuis cinq jours. Décidément, soit le messager était des plus rapides, soit l'Aile de Sable avait prit le temps de lui écrire très peu de temps après son arrivée chez lui. Ou bien était-ce un mélange de ces deux points. En tout cas, le résultat était bien là. Hermine avait enfin des nouvelles de son ami ! Intriguée, Harmonie poussa plusieurs couinements, agitant ses pattes dans la direction de sa Dragonne. Hermine tendit l'une de ses pattes vers sa charognarde, lui indiquant d'y grimper d'un petit signe d'une griffe. La petite créature hocha la tête et grimpa dans la patte de l'Aile de Glace. Cependant, Harmonie ne s'y attarda pas sachant pertinemment qu'Hermine n'était pas encore totalement guérie. La charognarde escalada donc la patte de sa Dragonne et vint s'installer au niveau de son épaule. Ainsi, elle avait la lettre bien en vue, bien que cela ne lui servait pas à grand chose étant donné qu'Harmonie ne savait pas lire l'écriture draconique. Avec un peu de chance, Hermine aurait la présence d'esprit de lire à voix haute. Dans ce cas-là, la charognarde aurait peut-être une chance de savoir, grâce à son intonation, si les nouvelles étaient bonnes ou pas ! Hermine commença sa lecture. Pour le plus grand plaisir d'Harmonie, sa Dragonne lut la missive à haute voix. Si la Dragonne faisait cela, c'était pour s'assurer que la missive était bien réelle. C'était la première fois que l'Aile de Glace recevait du courrier. Autant dire qu'elle comptait profiter de ce moment autant que cela était possible. La petite Dragonne lut donc la lettre sur le ton chantant qu'elle utilisait à chaque fois qu'elle récitait ou déclamait quelque chose. L'Aile de Glace ne le faisait pas exprès. Avec le temps, cette manière de s'exprimer lui était devenue naturelle quand il s'agissait de lire quelque chose. De plus, cela lui permettait de travailler plus souvent son élocution, et donc, de réduire progressivement ses bégaiements. La première phrase de la lettre fit sourire la petite Dragonne. Ainsi, elle n'était pas la seule à ne pas être habituée à ce genre de correspondance. Eh bien, se serait une première pour Mirage comme pour elle. Au moins, ils étaient à égalité, sur ce coup. Hermine poursuivit sa lecture. Elle poussa un soupir de soulagement en apprenant que le voyage de son ami s'était déroulé sans aucun problème. La voilà sa plus grande hantise, qu'il soit arrivé quelque chose à son ami pendant le trajet. Après tout, il voyageait seul... Il aurait pu lui arriver malheur à n'importe quel moment et peut-être que personne n'aurait été en mesure de l'aider... Hermine chassa cette idée de ses pensées, et reprit sa lecture. La petite Aile de Glace tenta pendant un instant d'imaginer les dunes dont parlait son ami. Cela ne lui fut pas facile. Son esprit était bien trop habitué à voir de la neige, de la neige et encore de la neige. Ainsi, la servante imagina les dunes de sable comme étant des sortes de petites collines neigeuses, mais avec une couleur différente et une température beaucoup plus élevée. C'était l'image la plus logique qu'Hermine pouvait se faire du désert. Une vaste étendue chaude, avec de nombreuses collines orangées. Bien évidemment, la Dragonne se doutait bien que cela n'était pas tout à fait ainsi dans la réalité, et que comme chez elle il devait y avoir beaucoup d'autres couleurs que celles qu'elle imaginait. Malheureusement, sans avoir jamais vu le désert, il était difficile pour la petite Dragonne de s'en faire une représentation fidèle. L'état de Mirage semblait aussi s'être amélioré. Hermine fut rassurée de ne pas s'être trompée. Son ami allait pouvoir reprendre des forces et passer du temps avec sa famille. Elle n'en attendait pas moins de lui. La suite de lettre étonna un peu la servante. Si elle pouvait tout à fait comprendre que Mirage ne supportait pas le climat du Royaume de Glace, la petite Dragonne devait avouer que c'était bien la première fois qu'on lui parlait de désincarnation pour ne plus subir les injures du froid. Gardant son étonnement dans un coin de son esprit, Hermine continua sa lecture. La petite Aile de Glace fut stoppée dans sa tentative d'imaginer le Repaire du Scorpion quand elle se rendit compte que Mirage avait fait partie d'un groupe Rebelle. En voilà une sacrée nouvelle ! La servante secoua la tête, se disant qu'elle avait du mal lire. Mais non, les mots restaient identiques. Hermine devait avouer qu'elle avait un peu de mal à imaginer son ami dans un groupe de ce genre. Peut-être qu'un jour, elle oserait poser des questions à Mirage au sujet de cette partie de sa vie... Sa surprise passée, Hermine réussit plus ou moins à se faire une image du Repaire du Scorpion. Une nouvelle fois, l'idée qu'elle s'en faisait était en partie issue de la représentation d'une ville d'Ailes de Glace, mais cela n'empêcha pas la petite Aile de Glace d'y trouver son compte. La servante lut ensuite les quelques lignes traitant des retrouvailles entre son ami et sa tante, puis le récit expliquant à quoi ressemblait la demeure familiale. Tiens... Hermine ne se doutait pas que les Ailes de Sable vivaient avec leur famille éloignée. Chez les Ailes de Glace, sauf cas exceptionnel, les générations vivaient chacune de leur côté et ne se réunissaient que rarement. Retourner chez ses parents était vécu comme une honte par la plupart des Ailes de Glace. Ce fait était considéré comme un signe de faiblesse... Hermine se demandait bien ce qui se serait passé si elle vivait avec toute sa parentèle... Cela aurait été... Assez étrange, mais pas forcément mauvais bien que la petite Aile de Glace n'était pas prête à tenter l'expérience pour autant, même si on lui proposait. Le simple fait de se retrouver en compagnie de son frère trop souvent lui suffisait à ne pas trouver envisageable le fait de vivre à plus de quatre Dragons sous le même toit. Ainsi, Mirage avait une Guérisseuse dans sa famille. Cela expliquait en partie son habilité quand il s'agissait de recoudre des plaies. Hermine rit quelques instants en essayant de visualiser la scène. Soleil et Vautour avaient du faire preuve d'un acharnement certain pour remettre Mirage sur pattes et lui redonner l'apparence d'un Aile de Sable. Hermine n'arrivait même pas à se représenter l'apparence de son ami à présent. Peut-être même qu'elle aurait du mal à le reconnaître quand ils se reverraient ! Le rire d'Hermine s'arrêta d'un coup quand elle prit connaissance des lignes suivantes. Pauvre Mirage... Apprendre la mort de son demi-frère le jour-même de son arrivée... Il ne devait pas s'attendre à cela, le pauvre... La petite Aile de Glace aurait tant voulu être là, ne serais-ce que pour s'assurer par elle-même que son ami allait bien. La perte d'un membre de sa famille faisait toujours un certain choc et les regrets donnaient, dans la plupart des cas, naissance à des remords... Hermine fit en sorte de se rassurer en se disant que son ami n'était pas seul. Après tout, s'il avait vraiment un problème, il était entouré de sa famille. La petite servante ne doutait pas que Mirage saurait trouver de l'aide. De son côté, Hermine ne pouvait faire qu'une chose, prier. Prier pour le demi-frère de Mirage, quand bien même elle ne l'avait pas connu et qu'il n'était pas un membre de sa famille. Après tout, mieux valait plus de prières que pas assez. Au moins, Aigle ne mourrait pas une deuxième à cause de l'Oubli de sitôt. Au plus des Dragons connaissaient son nom, moins il y avait de risques qu'il ne disparaisse définitivement des mémoires. Ainsi, il y avait une chance que Chavire ait été en compagnie d'Aigle au moment de sa mort. Voilà qui était bien étrange. Que pouvait faire l'Hybride en plein désert ? Voilà un fait peu banal, surtout au vu de ses ascendances. Peut-être cherchait-elle quelque chose. En tout cas, Mirage n'en disait pas plus à propos de la demi-Aile de Mer. A la vue de la suite de la lettre, Hermine sentit l'inquiétude lui enserrer le cœur. Son ami avait décidément besoin de repos. Elle espérait de toute son âme que l'Aile de Sable ne ferait pas de zèle et qu'il prendrait tout son temps pour se remettre de son séjour au Royaume de Glace. Hermine reprit sa lecture. Ainsi, Mirage entretenait de liens plutôt forts avec ses demi-sœurs. Voilà qui était rassurant, pour ne pas dire attendrissant. La petite Aile de Glace ne put réprimer un sourire. La servante en avait la certitude à présent, elle avait bien fait de pousser Mirage à retourner chez lui. Au moment où Hermine lut la mention faite aux étoiles, elle ne put s'empêcher de jeter un coup d’œil par la fenêtre. Dans son Royaume, la nuit tombait bien plus vite qu'ailleurs. L'après-midi était déjà bien entamée et même s'il faudrait encore attendre quelques heures pour que la nuit ne tombe réellement, son arrivée se ferait presque d'un coup. Si cela ne dérangeait plus les Ailes de Glace à l'heure actuelle, notamment grâce à l'un de leurs cadeaux animusés, Hermine se disait que ses ancêtres avaient dû connaître une époque où à partir d'une certaine heure, il faisait aussi sombre que dans la plus profonde des crevasses. Hermine fut attristée en lisant les dernières lignes de Mirage. Il y avait un raison à sa peine. Cela voudrait dire qu'elle n'aurait plus de nouvelles de son ami avant un moment, le temps que sa propre réponse lui soit apportée et qu'il lui réponde. A regrets, la petite Aile de Glace enroula à nouveau l'étrange parchemin et le posa sur le bureau de Mirage. Elle devait lui répondre. Mais sur quoi ? La servante récupéra sa sacoche et fouilla à l'intérieur. Elle finit par y trouver un parchemin. Il était d'assez mauvaise qualité, il fallait l'avouer, mais Hermine n'avait pas vraiment les moyens de s'en acheter des meilleurs, quand bien même cela lui aurait plu. La servante sortit aussi un petit flacon d'entre de sa sacoche, ainsi qu'une longue plume d'un beau gris perle. Hermine l'avait trouvé il y a quelques temps, lors d'une chasse. Malgré quelques recherches, l'Aile de Glace n'avait jamais su à quel oiseau cette plume avait appartenu. Malgré cela, Hermine avait fini par ce dire qu'elle avait appartenu à un oiseau marin, étant donné le lieu de sa découverte. D'un petit coup de griffe, Hermine aiguisa convenablement la pointe de sa plume. Au moment de tremper la pointe dans l'encre, la servante se ravisa. Portant l'une de ses pattes au niveau de son menton, la petite Aile de Glace se demandait comment commencer sa lettre. Il ne fallait pas quelque chose de trop pompeux, ni de trop familier. Il lui fallut un petit moment pour trouver une accroche satisfaisante. Une fois cela fait, Hermine trempa sa plume dans son encrier et commença la rédaction de sa lettre. Bien le bonjour, Mirage.
Je crains que nous ayons le même niveau, en ce qui concerne la formulation ou l'écriture d'une lettre. Ceci étant dit, sachez que je suis très heureuse d'avoir de vos nouvelles et de savoir que votre voyage s'est déroulé de la meilleure des façons. Le plus important, c'est que vous soyez enfin chez vous. Vos recherches sont toujours sous bonne garde, je peux vous l'assurer. Le Repaire du Scorpion m'a l'air d'être un lieu très vivant. Bien plus vivant que les quelques villages Ailes de Glace que j'ai eu le loisir de visiter. D'un autre côté, nos deux Royaumes sont forts différents. Je suis sûre que nous pourrions passer des journées à lister ces différences et qu'il nous en manquerait toujours quelques unes ! N'hésitez pas à m'envoyer tous les croquis que vous pourrez ! Malgré mon imagination somme toute débordante, les images que je me fais de votre Royaume font sûrement pâle figure par rapport à la réalité des choses ! Tout doit être si coloré chez vous ! Cela doit être vraiment très beau à voir !
Passez mes sincères et amicales salutations à toute votre famille. Nous ne nous connaissons peut-être pas, mais je leur souhaite beaucoup de bonheur, surtout après ce qui s'est passé. Perdre un proche n'est jamais un événement simple à vivre. Je prierai pour Aigle. Son nom ne sera pas oublié. Ce n'est peut-être pas grand chose, mais je tiens à faire ce geste. Et ce, même si Aigle n'est pas de ma parentèle. J'espère que vous ne prendrez pas ma réaction comme un acte déplacé. Ce n'est pas mon but. C'est juste que... Que l'Oubli est la pire des Morts. Ce pauvre petit ne mérite pas cela. Personne ne mérite cela.
Cette histoire a du vous marquer. Si vous tenez à en avoir le cœur net, la seule chose que vous puissiez faire est d'envoyer une lettre à Chavire. Elle se sent peut-être coupable pour ce qui est arrivé à votre demi-frère. Se serait compréhensible. Néanmoins, il y a une chance qu'elle vous réponde. Peut-être pourra-t-elle apaiser votre peine. Si vous avez besoin de quoique se soit à ce propos, je me tiens à votre entière disposition.
L'endroit que vous me décrivez me semble propice au repos. C'est tout ce que je vous souhaite. Remettez-vous bien de votre séjour au Royaume de Glace. Je prends soin de vos possessions en attendant votre retour. Je me suis aussi permise de vous procurer de quoi allumer vos lanternes. En effet, vos réserves étaient on ne peut plus faibles. Promis, je ne toucherai à rien d'autre à moins que vous n'en fassiez l'expresse demande. Je tiens à ce que vous ayez tout ce dont vous avez besoin à votre retour.
Dans le cas où vous inquiéteriez de ma santé, vous serez ravi d'apprendre que mes plaies ont bien cicatrisé. Ce n'est plus qu'une question de temps avant que les fils ne soient inutiles. Il semblerait que ma mère, la vôtre ainsi que votre tante se ressemblent assez. Ma mère est toujours derrière moi, pour s'assurer que je me nourris bien et surtout, que je me repose. Vous n'êtes pas le seul à avoir été mis au repos de manière plus ou moins forcée ! Pourtant, je dois avouer que cela me fait le plus grand bien. Même si je dois composer avec quelques migraines, mon corps se remet très bien de ces vilaines blessures. Bientôt, je pense pouvoir décoller, voler, et me poser sans avoir besoin d'aide ! Vous ne pouvez pas savoir à quel point j'ai hâte de pouvoir voler librement comme avant ! Harmonie se porte aussi très bien. Figurez-vous qu'avant que je ne reçoive votre lettre, elle était en train de tracer un Dragon sur ses futures peaux. Je ne sais pas à quoi ressemblera le résultat, mais je pense que cela sera magnifique. Ma petite créature a toujours été très habile de ses pattes. Une vraie petite artiste. Je me demande si tous les charognards sont comme elles, ou si comme les Dragons, ils ont des centres d'intérêts diversifiés. Imaginez... Des charognards-chasseurs, d'autres qui enseigneraient leur savoir aux autres, ou même des Guérisseurs ! Peut-être même ont-ils des coutumes, ou une manière d'écrire ! Cela doit vous sembler étrange. Pourtant, ces hypothèses me donnent envie d'en savoir plus sur les charognards. Qui sait, un jour j'aurai peut-être l'occasion de les voir de plus près pour confirmer ou infirmer mes pensées.
Je m'égare, veuillez m'en excuser. J'espère pouvoir vous suivre, un jour. C'est avec le plus grand des plaisirs que je vous accompagnerai au Royaume de Sable, ou ailleurs. Vous m'avez beaucoup décrit le monde extérieur. Je veux le voir de mes propres yeux, à présent. Les plaines glaciales me manqueront, c'est sûr, mais si c'est pour faire d'avantage de découvertes, je suis prête à les quitter pour un temps. Puisse ce vœu se réaliser.
Que vos ancêtres guident vos ailes et vous gardent à l'abri des fureurs du ciel.
Soyez assuré, Mirage, de mon amitié la plus sincère.
Hermine.
PS : Il devrait y avoir deux feuillets dans l'écrin. La seule chose que je peux vous dire à ce propos, c'est que ma grand-mère, Zibeline vous a fait un présent.Satisfaite de ce qu'elle venait d'écrire, la petite Aile de Glace reposa sa plume, laissant l'encre sécher sur le parchemin. N'oubliant pas de renseigner l'adresse de Mirage afin que le courrier arrive bien à destination, Hermine profita aussi du temps de séchage pour fouiller à nouveau dans sa sacoche. Après quelques instants, la Dragonne finit par trouver ce qu'elle cherchait. Il s'agissait d'un petit morceau de parchemin, plié en deux. Hermine déplia délicatement le bout de parchemin, et le parcourut rapidement des yeux pour s'assurer que tout était en ordre. Il s'agissait d'un petit dessin d'Harmonie, fait par les soins de Zibeline, la grand-mère de la petite Aile de Glace. La servante avait été la voir, la veille. Sa grand-mère maternelle n'avait pas pu s'empêcher de griffonner ce petit dessin alors qu'Hermine était venue lui rendre une visite avec sa mère. Au tout début, la petite servante n'avait même pas remarqué que Zibeline était en train de dessiner. En tant que digne fille de Fantôme, l'ancien Conteur de leur famille et des environs, Zibeline avait eu la possibilité de développer quelques talents artistiques. Son père aurait été gêné de l'empêcher de progresser en dessin, étant donné qu'il s'adonnait à son art dès qu'il en avait la possibilité. Ainsi, même si la vieille Dragonne aux écailles roses n'avait jamais été reconnue pour son art, elle en faisait tout de même profiter certains de ses proches, quand elle en avait l'envie. Hermine passa l'une de ses griffes sur le dessin. Zibeline avait choisit un moment où elle était avec sa charognarde pour son dessin. Ainsi sur le croquis, on pouvait voir Harmonie assise en tailleur entre ses cornes. La petite créature était en train d'aiguiser son étrange griffe crantée à l'aide d'une sorte de pierre. Quant à Hermine, elle était en train de consulter un parchemin donné par sa grand-mère. Il s'agissait d'un des contes de son arrière-grand-père, l'un des seuls qu'il avait écrit avant de quitter ce monde. Avec la permission de sa grand-mère, la petite servante avait eu le droit de garder le parchemin. Peut-être pourrait-elle le lire à Mirage un jour, si l'Aile de Sable le souhaitait. Pour ajouter un peu de couleur au dessin, Zibeline avait même prit la peine de colorer les longs poils que la charognarde avait sur la tête dans un beau roux sombre, ainsi que les écailles roses de sa petite-fille, sans oublier l'étrange marquage qui traversait chacune de ses joues. Hermine aurait préféré que le dessin reste en noir et blanc. Mais sa grand-mère avait été très gentille en acceptant de faire le dessin en deux exemplaires. Hermine n'avait donc pas jugé cela correcte de se plaindre au sujet de la couleur. D'un autre côté, l'étonnement de sa grand-mère avait été tel quand elle avait apprit que sa petite-fille avait un ami qu'elle aurait sûrement accepté sans broncher de faire un double de son dessin dans tous les cas. Surtout en sachant que ce double était destiné au seul véritable ami de sa petite-fille. En plus d'Harmonie. Mais Hermine se voyait mal dire à sa grand-mère que sa petite charognarde comptait autant à ses yeux qu'un Dragon. Hermine déposa le dessin sur le bureau. Elle reprit sa plume quelques instants, et traça quelques mots à l'arrière du croquis avec son application habituelle. « Harmonie vous passe le bonjour, elle aussi. » Suite à cela, la petite Dragonne délaissa le dessin quelques instants pour glisser la lettre dans l'écrin. Quand la petite Aile de Glace voulut se saisir du croquis, quelle ne fut pas sa surprise quand elle remarqua que sa charognarde avait trempé ses petites pattes dans l'encre avant de les appuyer contre le dos du dessin ! « Oh... Harmonie... Hermine se tut. Esquissant un petit sourire, la petite Dragonne ébouriffa les poils que sa charognarde avait sur sa tête, au grand dam de la petite créature qui poussa plusieurs couinements de mécontentement. On peut dire que je t'ai prise les pattes dans l'encre ! » termina la Dragonne, sur un ton amusé.Harmonie se contenta de poussa d'autres couinements avant de regarder ses pattes, se demandant certainement comment elle allait faire pour retirer toute cette encre. Hermine déchira un morceau de buvard, et le tendit à sa charognarde. Cela suffirait amplement jusqu'à temps que la Dragonne puisse emmener sa petite créature se laver. Pendant que sa charognarde nettoyait ses pattes, Hermine glissa le dessin dans l'écrin. Une fois cela fait, la petite servante referma le boîtier et le reposa sur le bureau. Jetant un regard dans la direction de la fenêtre, la servante remarqua que le soleil était toujours visible. Avec un peu de chance, si elle dépêchait, elle pourrait donner sa lettre avant que les prochains messagers ne se mettent en route ! Hermine déposa l'écrin dans sa sacoche. Comprenant ce qui était en train de se passer et ayant réussit à se débarrasser d'une partie de l'encre qui couvrait ses pattes, le reste ayant déjà séché, sa charognarde grimpa sur sa patte. Ensuite, elle continua sa route jusqu'à son épaule, pour finir sur son dos. Une fois sûre que sa petite créature était bien en place, la petite servante s'en alla en prenant le soin de bien fermer la porte derrière elle. Le Palais disposait de son propre service de messagers. Si un Dragon vivant en ces lieux souhaitait envoyer quelque chose, il devait se rendre dans la salle prévue à cet effet et remettre sa missive ou son colis aux Ailes de Glace qui travaillaient aux services postaux. Le courrier et les colis étaient ensuite triés, en fonction de la destination, et par la suite on assignait à chaque messager un endroit de livraison. Hermine finit par arriver à la Salle des Services Postaux. Avec les messagers qui quittaient la salle avec leurs sacoches pleines de courriers divers ou qui y revenaient pour la tournée suivante, le reste du personnel qui tâchait de trier les nouveaux arrivages le plus vite possible, et les occupants des lieux entraient avec les pattes toujours chargées, il y régnait une grande agitation à tout moment de la journée. La petite Aile de Glace fut rassurée en voyant qu'il restait un grand nombre de messagers encore disponibles. Une nouvelle tournée se préparait donc, ce qui signifiait que son courrier pourrait sûrement partir aujourd'hui même. La servante se rapprocha d'un des Dragons travaillant au poste de tri. Ce dernier ayant le même rang qu'elle, les deux Dragons se saluèrent selon les convenances. Ensuite, la petite Aile de Glace put expliquer ce qui l'amenait. « Je dois envoyer une lettre au Royaume de Sable. Est-ce encore possible ?- Hum... L'autre Aile de Glace jeta un regard aux messagers présents. Il semblerait que oui... Puis-je prendre votre missive ? » demanda-t-il, d'un ton las. Hermine acquiesça et sortit l'écrin de sa sacoche pour le tendre à son congénère. Celui-ci regarda l'écrin, visiblement surpris de voir qu'une Dragonne de son rang puisse se permettre ce genre de fantaisie. Cependant, au grand soulagement de la petite Aile de Glace, l'autre Dragon ne fit pas de commentaire. Après tout, elle pouvait très bien être envoyé par son employeur. Rien ne disait que c'était elle qui avait écrit la lettre, l'employé n'ayant jamais vu son écriture auparavant. L'Aile de Glace cessa son observation minutieuse de l'écrin et s'en alla vers l'un des messagers. Il discuta quelques instants avec ce dernier, avant de lui remettre la missive, et de s'en retourner à son poste. Là, il déclara à l'attention de la petite servante : « Votre courrier a été pris en charge. Je vous souhaite une bonne soirée. - Merci beaucoup ! Au revoir ! »Si Hermine était un peu moins guillerette, elle aurait sûrement remarqué l'étrange regard que lui avait lancé l'autre Aile de Glace quand elle l'avait salué d'une manière aussi chaleureuse. Mais non. La Dragonne était bien trop heureuse pour se rendre compte de ce genre de chose. C'est donc le cœur léger qu'Hermine s'en alla, avec la joie de savoir qu'elle aurait sûrement des nouvelles de son ami prochainement. | |
| | | Mirage Légende
Messages : 176 Or : 6077 Réputation : 4 Date d'inscription : 02/11/2016 Age : 23 Localisation : En Tyrie
Fiche Dragon Nom du Dragon: Mirage Métier: Clan: Aile de Sable
| Sujet: Re: De Plumes et d'Encre [Hermine/Mirage] Jeu 19 Avr - 21:20 | |
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Le soleil s'était couché quatre fois depuis que Mirage avait fait envoyer sa missive au palais de glace. Durant ces quelques jours, Soleil et sa sœur l'avaient obligé à se reposer, et quand bien même il avait eu beau insister sur le fait qu'il n'était pas malade au point d'être alité, elles se montraient plus tenaces à ce sujet qu’une moule s'agrippant à un rocher. Elles refusaient même qu'il sorte en ville, au risque (selon elles) de faire un malaise. « Les soins ont des limites, le ridicule aussi… » avait pensé l’Aile de Sable, ne doutant point, au fond de lui, qu’il se pouvait qu’elles aient raison. Au bout d'une journée d'insistance, il avait donc abandonné et s’était plié à leur volonté. Aussi, moins il leur opposait de résistance, plus vite elles le laisseraient sortir. Bon sang, il n'était plus un dragonnet Il ne dépendait plus des soins de sa famille depuis au moins vingt ans. Même étant érudit, passer de longues heures dans la même pièce à lire de vieux parchemins aux informations probablement erronées ou obsolètes était plus que franchement lassant. L’on associe souvent l’érudition à la sagesse, et la sagesse à la vieillesse. Pourtant Mirage était encore au printemps de son âge, certes un printemps bien fleuri, mais tout de même un printemps témoin de sa jeunesse et de toutes les fougues qui l’accompagnent. Il était fait pour l'exploration et l'étude sur le terrain. C'était un aventurier, et ne pas changer pas de décor alors que tout au dehors semblait l’appeler lui donnait l'impression de n’être qu’un vieux tas d'écailles cloîtré dans une bibliothèque comme ce pauvre Comète résigné - quoique ce dernier semblait s’y complaire, mais Diable, même s’il valait mieux pour son moral qu’il en soit ainsi, il ne savait pas ce qu’il ratait au dehors. Sur sa demande Soleil lui procura un bloc de pierre à sculpter pour le mettre dans l'impluvium, en l'honneur d'Aigle. Celle-ci en avait déjà gravée une, mais Mirage avait tenu à faire son propre petit mémorial. Sa mère ne l'en avait pas empêché ; tant qu'il restait à la maison, elle ne bronchait pas. Mirage s'était rendu une fois dans l'impluvium, que l'on appelait ainsi par métonymie. C'était justement la pièce qui se trouvait sous sa chambre, et qui s'enfonçait plus loin. La porte à côté des marches menant à son balcon (souvenez-vous, il s'était demandé où elle menait quelques jours plus tôt) en était en fait l'entrée. C'était une salle toute en longueur, moyennement grande et presque vide. Son plafond était un peu bas par rapport aux autres pièces de la demeure familiale. L'intérieur comportait des tapis de méditation, des autels, et était éventuellement éclairé par de grandes lampes filigrane en métal où brûlaient d’immenses bougies. L’endroit était des plus calmes du monde, du genre où l'on se mettait à chuchoter sans même savoir pourquoi. L'ambiance elle-même imposait le respect. Des carillons colorés étaient suspendus et entretenaient par leur doux tintement le silence qui y régnait. Au fond se trouvait donc l'impluvium des ancêtres, un bassin rectangulaire, profond d'une patte à peu près et pavé de mosaïque faite à partir d'obsidienne très noire et polie. Il était de taille moyenne et suivait la forme de la pièce en sa longueur, placé contre le mur du fond qui avait été creusé et resculpté pour y accueillir un autel et une autre modeste bougie. L'eau qui le remplissait était très claire et d’un calme plat et, au fond du bassin, entre autres perles de cornaline, d'agate et de pétales reposaient des orbes à peine plus large que la paume d’un dragon, d’une rondeur imparfaite et délicieusement gravées. Chacune d’elles correspondaient à un membre défunt de la famille. Il y en avait sobrement une douzaine. Au dessus de la fontaine, une ouverture dans le plafond faisait la principale source de lumière naturelle de la pièce. Ce n'était pas tant pour permettre à la pluie de se déverser dedans, parce qu'il ne pleuvait que très rarement dans le désert, mais plutôt pour ne pas enfermer les souvenirs et laisser les étoiles se mirer dans l’eau pâle. Si les nuits étaient claires, l’impluvium donnait l'illusion d'un véritable miroir. C'était un endroit presque sacré, comme une meurtrière qui donnerait sur l'outre-monde, et l'air y vibrait de murmures inaudibles entre la réalité et l'au-delà. Le dragon fignola sont travail en grattant quelques détails avec un petit rifloir, avec ces images apaisantes en tête. Voilà plus de quinze ans qu'il n'avait touché à son matériel de sculpture, mais il se débrouillait très bien. Il faut le dire, il avait toujours eu cette capacité à ne jamais régresser dans une matière, et même à s’enrichir alors qu’il ne pratiquait pas. Sa mère qui lui avait donné ce kit alors qu'il était en âge de comprendre que l'art allait au-delà de l'esthétique. Un des meilleurs souvenirs de son enfance. « Écoute bien ce que je te dis là, Mirage. Je vais te parler d’Art avec un grand A, celui qui est immortel, qui survit à toutes les guerres, s’affranchit de la religion et qui existera toujours dans le coeur de l’innocent. Beau ou laid, ça, on s’en fiche. Ce n’est pas la question. La beauté, dans sa conception individuelle, n'est que la conclusion de ce que l’Art t’évoque. J’aime à définir l’Art ainsi : c’est donner une forme à nos battements de coeur. Tu sais, nous pourrions pas vivre sans Art. Enfin, notre corps le peut, si. Mais ce qui fait notre identité, c’est notre esprit et notre coeur, ce qui constitue notre âme, en somme. Je crois que tu sais ce que sont les sentiments et les émotions. Je t’ai déjà expliqué la nuance il me semble. Et bien l’Art, c’est traduire ces choses-là et les rendre perceptibles à nos sens et à ceux des autres. C’est la passerelle de communication des sentiments. J’espère que tu me suis toujours… Prenons un exemple. Tu es affreusement triste, et personne ne semble te comprendre. Tu es musicien. Avec ton instrument, tu vas créer une musique qui, par le choix des notes et de la façon dont tu les lient entre elles, va illustrer ta tristesse et la rendre transmissible à ceux qui ne la comprennent pas, pour qu’ils puissent la ressentir à leur tour. Ce n’est pas si compliqué, tu vois. Et c'est là le grand pouvoir des artistes ; ils ont une main sur notre cœur. Et comme l'ennemi du barde est celui qui n'écoute pas, que l'ennemi du peintre est celui qui n'observe pas et que l'ennemi de l'écrivain est celui qui ne lit pas, le grand ennemi de l'Artiste est l'Insensible. La violence, entre autres. Tu sais, Mirage, on peut combattre l'épée par la plume. Là encore, c'est tout un savoir faire... Que je veux que tu apprennes, si comme tu dis, tu veux la paix dans le monde. » Mirage avait toujours été réfléchi. Dragonnet déjà, il s’était doté d’une profonde sagesse et sa mère l’avait remarqué. En réalité, Soleil et lui se ressemblaient beaucoup, sauf en terme de sévérité – et encore, il était plus sévère avec lui-même que sa mère ne l’était avec les autres. Avec cette définition très claire de l’art en lui, il était devenu capable de maîtriser les mots, les sons et les images qui lui avaient permis d’obtenir une certaine notoriété auprès des bibliothécaires et de leurs rats. L’amitié que les dragons de toute race avaient pour lui venait de ce pouvoir qu’il avait en employant l’Art pour communiquer. Incroyablement contradictoire, pour un scientifique, n’est-il pas ? Laisser sa pensée se débaucher tout en suivant les règles strictes de faits établis et irrévocables. C’était peut-être les deux choses à marier pour faire naître la paix dans ce monde terriblement belliqueux. Quoiqu’il en soit, l’orbe était maintenant terminée, ornée de nombreuses lignes et spirales mystérieuses qui à première vue n’avaient pas de sens. À seconde vue non plus. À peu près autant qu’à troisième vue, même. Il fallait avoir l’oeil d’un astronome pour les lire ; elles représentaient en réalité la voûte céleste et l’on reconnaissait seulement un symbole lunaire et un symbole solaire qui s’opposaient. La sculpture, aussi étrange soit-elle, était une belle métaphore de l’éternité et du cycle de la vie. Elle était accompagnée d’une petite inscription poétique adressée au défunt. Tranquillement, Mirage quitta sa chambre. Le vent de midi soufflait sans interruption, passant de bise à bourrasque sans qu’on ne puisse le prévoir. De ce côté du rempart, on n’entendait point l’animation de la ville : seulement le silence du désert et l’inaudible musique des grain de sables qui chahutaient dans le vent. Après une inspiration, Mirage se rendit dans l’impluvium ancestral. Lorsqu’il ouvrit la porte en bois séché les carillons tintèrent, caressés par la demi-brise qui s’y était invitée pendant ce laps de temps. La pièce dormait dans la pénombre et le moindre son résonnait. Du sable joueur s’y égara dans un petit écho poussiéreux tandis que soupirait le vent au dessus de l’ouverture éclairant le bassin, émettant un sifflement grave alors qu’il s’écorchait aux parois de pierre rousse. Mirage avança en feutrant instinctivement ses pas. Arrivé au bord de l’eau, il jugea une dernière fois son travail, frottant du pouce les détails pour s’assurer qu’aucune saleté ne s’était glissé dans les rainures. Satisfait, il se pencha et plongea l’orbe franchement. À sa grande surprise l’eau était assez froide, fraîche plus exactement, si bien qu’il eut un frisson qui lui parcourut tout le corps jusqu’à la moindre de ses écailles. Il glissa cependant la pierre au fond avec le plus grand soin. Sa pâleur se détachait sur la mosaïque noire qui faisait tapis. L’aile de Sable se recueillit. Il pensa, pensa énormément. Aigle… Du plus récent souvenir qui lui restait de lui, ce jeune dragon avait tout d’une graine de héros. Il avait les qualités, l’ambition et la volonté d’aider ce monde. Il arrivait même à faire abstraction de la fatalité. Il acceptait même la mort, et c’était dommage qu’elle lui soit arrivée si tôt. « Oh, petit frère. J’aurais voulu te connaître davantage. » « – Des larmes que nous versons aujourd’hui, puissent mille fleurs s’en abreuver pour fleurir demain. » Mirage se retourna. Soleil était là, l’air sereine, un sourire triste vieillissant son visage. Ses iris ambrés étaient encore en train de relire la prière écrite sur l’orbe gravée de son fils aîné. « – Tu es un vrai poète. Aigle t’admirait pour cela. Il disait que tu avais une voix faite pour parler. C’était maladroit comme expression, mais il avait bien raison. Et même… Peut-être pas si maladroit.– Peut-être. J’aurais vraiment voulu le connaître… Mieux que ça. Parfois, je me dis que mes recherches sur la magie animus au confins du Royaume de Glace ne mènent à rien. J’ai pourtant découvert d'innombrables choses… Mais j’ai l’impression de tourner en rond. Je n’ai encore jamais rien accompli de bien jusqu’à présent. Rien.Soleil inspira. – Je ne suis pas ta mère pour te dorloter quand tu es triste, te dire le contraire positif de ce que tu penses quand ton humeur se prête au désespoir. Je suis là pour te conseiller et te pousser à aller plus loin. Mais tu le sais, tu aimes l’honnêteté même quand elle te blesse. Je crois que tes études sur la magie n’apporteront rien pour l’instant. Rien de bien, tant qu’il y a d’autres problèmes à régler. La paix est fragile, et il faut d’abord la consolider. Les dragonnets du destin ont fait une bonne oeuvre avec leur école mixte. Ils unissent des dragons venus des quatre coins de pyrrhia en quelques mois, et toi, il est vrai, depuis toutes ces années, tu t’es montré moins efficace. Il faut revoir l’ordre de tes priorités : la magie, mets-la de côté. Voyage et unis les peuples. Si tu as le sentiment de ne rien avoir fait jusqu’à aujourd’hui – même si je crois fermement que c’est faux et je peux le prouver – c’est parce que tu as un terrible manque de confiance en toi. Lance-toi. Aigle avait cette confiance-là, mais ses idées étaient désordonnées. Toi, tu sais ce qu’il faut faire, mais tu as trop peur d’échouer, alors tu te prépares continuellement à une épreuve quelconque. La vérité est que peu importe ce que tu fasses, tu auras toujours ce sentiment d’échec. Ton monde idéal d’amour et de paix n’existera jamais, parce qu’il y aura toujours des individus mauvais. Le Bien et le Mal n’ont de sens que s’ils sont ensembles. Il y a un équilibre, et cet équilibre, c’est notre monde.Mirage secoua la tête. – Tu te méprends sur mes motivations Maman. Je sais bien que le monde est multicolor. Mais je veux simplement éviter les pire turies et les guerres. La magie animus en est souvent la cause. Elle est à manipuler avec sagesse, et peu de dragons sont sages en ce monde. Une solution voudrait que tous les animus soient exécutés, mais je n’ai pas l’intention d’assassiner des dragons pour des crimes qu’ils n’ont pas commis. Ce pouvoir doit être utilisé à bon escient. Comme toute magie.Il y eut un léger silence, puis Soleil concéda : – Bon. Soit. Mais tu n’y arriveras pas tout seul… Et je crois qu’il faut que tu aides le monde à se stabiliser avant de publier tes recherches. Mirage, plus aucun peuple ne veut de guerre maintenant. Les Reines sont toutes lasses de parler la langue de la guerre. Profite plutôt de ce moment d’émergence, alors que les souvenirs sont frais, pour faire passer tes messages de paix. Suture les mémoires avec la médecine de l’Art. Et puis… Tu as besoin de vivre un peu. » Elle avait bien raison. Vivre… Ressentir des choses. Tout cela lui manquait. Soleil l’entoura de ses ailes. il s’y blottit volontiers et écouta sa respiration derrière sa poitrine. Son coeur battait si fort... Si fort que cela lui chatouillait l’oreille. Elle l’aimait vraiment, son fils. Hermine, chère amie,
J’espère que vous vous portez bien, là-bas sous votre ciel blanc, sur votre sol blanc. Parfois je pense à la neige, et je me dis qu’ici, c’est bien différent. C’est avec une joie revigorante que j’ai ouvert l’écrin contenant votre lettre. Je suis heureux de savoir que la cicatrisation se passe comme prévu, et plus ravi encore de savoir que bientôt, vous serez à nouveau en pleine forme ! J’en remercie votre mère, qui se montre très à l’écoute et très bienveillante envers vous. Au moins, vous n’êtes pas seule, et cela me rassure.
Avant toute choses, sachez qu’il me fait chaud au coeur de vous savoir si impliquée dans l’entretien du souvenir de feu mon demi-frère. Vous n’étiez pas obligée… Cela me redonne beaucoup d’espoir en ce monde. J’ai transmis vos voeux à ma famille. Ils ont eux aussi été très touchés, et vous remercient du fond du coeur en retour. Ils sont aussi très curieux de vous connaître. Les écailles crépusculaires que vous méprisez tant font rêver mes soeurs..!
Pour bien m’introduire, je souhaite vous donner de mes nouvelles. Non pas par prétention, mais je sais la touchante attention que vous portez à ma santé. Pour tout dire, je crois que le manque de soleil a gravement nuit à mon état psychique. Je m’aperçois aujourd’hui qu’une forme de tristesse s’évapore de mon âme et ma vue s’éclaircit quant à toutes les choses qui m’entourent. Je deviens plus lucide, et aussi à propos de mes objectifs. Soyez rassurée, je me porte de mieux en mieux. J’ai purgé ma fatigue, mes regrets et mes remords en larmes, il est vrai… Mais une aube nouvelle point à l’horizon de mon avenir. Je sens que le vent commence à tourner.
Soleil et Vautour m’ont empêché de sortir pendant ces quelques jours. J’ai bien cru que ma tante allait me ligoter à ma couche, mais elle n’en est pas venue à cette extrémité. J’ai honoré mon frère dans l’impluvium ancestral. C’est une coutume purement familiale, mais lorsqu’un membre de notre famille meurt, nous sculptons une orbes pour entretenir leur mémoire, et nous les plaçons dans un bassin d’eau douce. Je ne m’attarderai pas sur toutes les significations que cet impluvium peut avoir, mais cela nous permet de nous recueillir au plus près de nos morts, si bien que parfois, ils semblent nous murmurer des choses. Ma foi, Aigle ne m’a rien murmuré du tout, mais je ne me suis pas recueilli suffisamment longtemps. Ma mère m’a rejointe et nous avons parlé un moment. Ses conseils avisés me procurent une impression de sécurité et de stabilité interne aussi favorables à mon rétablissement qu’à la planification de mes futurs projets. Je pense laisser la science pour un temps et me consacrer à des activités plus sociales. Pour la citer, ma mère m’a dit que je devrais vivre un peu. Cela m’a beaucoup fait réfléchir.
Pour changer de sujet, – je n’aime guère parler de moi trop longtemps, cela me fait me sentir égoïste – ce que vous disiez au sujet des charognards est possiblement, et même probablement vrai. Je ne les ai pas étudié, mais si je recroise Brasier, je lui demanderai des nouvelles de ses observations. Les charognards ont une sensibilité bien plus proche de la nôtre que ne peuvent l’avoir d’autres animaux domestiqués, tels que les paresseux de la forêt de Pluie. Il ne serait pas étonnant que leurs coutumes, si tant est qu’ils en aient, ressemblent aux nôtre. Harmonie semble être une artiste, ce qui confirme cette idée de sensibilité évoluée. Je crois qu’il y a un potentiel à cette espèce. Ce serait fantastique si nous pouvions communiquer avec les charognards. Je crois même que nous devrions les nommer autrement que “Charognards”. C’est très dégradant pour une espèce qui se défend si bien face à notre toute puissance.
Quant à Chavire, j’ai bien peur de ne pas pouvoir être en mesure de la contacter pour le moment. Elle est discrète et mouvante, et la seule façon de pouvoir la rencontrer désormais est par hasard. J’ai questionné Soleil à ce sujet, elle m’a dit qu’elle avait demandé à la dragonne où est-ce qu’elle pourrait la trouver si jamais elle avait besoin qu’on l’aide, mais elle a répondu qu’elle n’oserait pas accepter l’aide de la famille dont elle avait condamné le plus jeune fils, mais qu’il était possible de la recroiser dans les grandes villes dans les auberges ou lors des banquets et des fêtes, en tant que troubadour. L’enquête est à mener… C’est une raison de plus d’écumer Pyrrhia.
Vous devinerez ma surprise lorsque j’ai vu ce portrait qu’a réalisé votre grand-mère ! Mes compliments à celle-ci ; il est très réussi ! L’on dirait que l’art est une pratique familliale, avec une poète telle que vous, et votre mère, gardienne des mots à la bibliothèque si mes souvenirs sont bons… Transmettez lui aussi mes remerciements. Je le conserverai avec grand soin. Il me plaît à penser que grâce à ce portrait je saurai, si je vous perds un jour, me rappeler de vos visages à Harmonie et vous, en grands détails.
J’ai moi-même mis à profit mes dispositions en matière d’illustration pour vous aider à vous faire une représentation de mon désert natal, et comme je n’ai pu sortir de chez moi durant ces derniers jours, j’ai eu tout le loisir de m’employer à cette tâche qui s’est avérée de plus tout à fait reposante. Ci-joint à cette lettre un carnet dans lequel vous trouverez des croquis de différents paysages observables dans le désert qui s’étend du sud du Royaume de Glace jusqu’aux pieds de la chaîne des montagnes de jades. Si cela vous intéresse, vous trouverez dans le tiroir B5 du mur de mes quartiers différents ouvrages illustrés traitant de la flore et de la faune des différents royaumes. L’un d’eux est consacré au Désert de Sable. Soyez libre de le consulter si la curiosité vous y pousse. Le colis que vous avez reçu contient normalement un échantillon de sable du désert, (Si vous l’éclairez à la lumière d’une flamme, vous pourrez avoir une idée de la couleur du désert lorsque se couche le soleil.) quelques patrons des tissus qui ornent la ville. (ces modèles sont spécifiques à notre culture Aile de Sable) Vous en trouverez des bleus, des rouges, des jaunes, de nuances différentes, et même des violets. À mon sens, c’est un délice pour les yeux. J’ai aussi ajouté un sachet en coton contenant des plantes séchées. L’odeur apaisante qui s’en dégage est idéale pour qui manque de sommeil et atténue les maux de tête. Les migraines que vous évoquiez m’y ont fait penser. Enfin, vous trouverez dans ce colis quelques plumes des différents oiseaux locaux. Exposez-les, portez-les comme ornement, faites en des plumes à encre… Elles s’avèrent toujours utiles sans qu’on ne le prévoit. Personnellement, je les utilise comme marque-page.
Encore mille mercis. Votre amitié m’est précieuse, sachez-le. J’ai toujours eu grand mal à exprimer ce genre de chose mais, une plume dans la main, tout devient plus simple pour moi, aussi étrange que cela puisse paraître !
En attendant de vos nouvelles,
“Vivez pleinement chaque jour de la Vie, De peur que nul lendemain ne succède à la nuit.”
Respectueusement Mirage, érudit et partisan de la paix. (Et votre ami, accessoirement.)
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